Arènes
de Saint Sever, mercredi 8 mai 2013
6 toros de Sanchez Fabres (encaste Coquilla) pour José Calvo (silence, vuelta) Luis Bolivar (salut au tiers, silence) Thomas Dufau (oreille, deux oreilles)
Contexte
particulier que celui de cette corrida organisée par un collectif
d’aficionados pour que soit tué en piste et non à l’abattoir le dernier
lot de la ganaderia Sanchez Fabres
Élevage
autrefois très prisée il a été écarté par manque de trapio des grandes
pistes et par complexité des cartels pour vedettes en seconde et troisième
catégorie.
Bien préparée médiatiquement, cette course a attiré malgré une météo
automnale presque 6/10ème d’arènes sur le plateau de Morlane.
Autant parler tout de suite de ce qui fâche .On savait par avance
que la corrida serait dans le type coquilla c'est-à-dire petite et
légère avec des armures courtes. Mais entre court et astigordo, il
y a une différence. Deux au moins des toros aux cornes trop arrondies
auraient du être laissés en réserve.
Hélas, une fois de plus, sous la pression des cuadrillas et de certains
apoderados ce sont les deux toros les mieux armés qui ont fait office
de sobreros. Paradoxe taurin, ces deux toros seront probablement afeités
pour être tués en festival ou en privé (cherchez l’erreur !!!!!!!!!!!!).
C’est aux organisateurs, de rétablir les bonnes pratiques du payeur/décideur
par respect de l’éthique taurine et du public qui un jour décidera,
lui, de ne plus payer.
Qu’ils soient mansos comme le 5ème, mansos con casta comme les 3 ,4
et 6 ou excellent comme le second, les coquillas ont maintenu l’intérêt
en piste du premier au dernier tercio, et ont été applaudis
à l’arrastre.
Seul
vilain petit canard, le premier faible et sans charge. Peut-être faut-il
voir là les conséquences d’un essai d’utilisation des fundas mal maîtrisé.
Photos
Laurent Larroque, tous droits réservés.
C’est
José Calvo qui a hérité de ce toro .Torero sans contrat, le
valencian jouait gros en cet après-midi. Mal servi par le faible premier,
il n’a pu nous montrer que son envie de bien faire. Après un tercio
de piques désordonné et sans démonstration de bravoure, le Sanchez
Fabres se réfugie dans les planches dont il ne sort que pour répondre
par des demi-charges aux sollicitations du torero. La faena constituées
de passes isolées, arrachées une par une est conclue par une demie
et une entière toutes deux en avant.
Le quatrième est un des mieux présentés du lot. Il prendra trois piques
en poussant, une carioca et deux piques correctes (piquero Gabin Rehabi)
(sic). Bon début à droite, José Calvo entreprend ensuite le toro avec
beaucoup de sincérité à gauche . A droite le toro est moins clair
et les séries plus accrochées mais toujours aussi vaillantes.
Après un final élégant, une demie et une entière et le torero aurait
du couper une oreille .Hélas son puntillero, Paquito Leal fait preuve
de son habituelle inefficacité et sabote tout le travail du torero,
que pena !!! Les trophées se limitent à une vuelta. Calvo ne sera
jamais une figura ,mais il fait partie de ces garçons valeureux qui
mériteraient d’avoir plus de contrat .Espérons que son âge lui permettra
d’être plus souvent à l’affiche , comme Joaquin Bernado en fin de
carrière, pour servir de chef de lidia à des figuras peu motivées
à assumer cette responsabilité.
Luis
Bolivar, conséquence de la crise et d’une apathie qui a fini par
lasser les publics, est lui aussi à la recherche d’une course pour
lancer sa temporada et obtenir les contrats qui lui font défaut aujourd’hui.
Il a la chance de toucher un excellent toro à la fois brave et noble
qui permet le triomphe. Le toro pousse bien sous une vilaine pique
trasera, le piquero rate la seconde et a la verguenza de ne pas replacer
le fer quand le toro est dans le peto. La troisième est un modèle
du genre, la cavalier se croisant littéralement avec le bicho pour
provoquer la charge et contenir la bravoure du Coquilla (picador applaudi).
Le péon Raul Aldrada est invité à saluer après une superbe troisième
paire.
Au troisième tiers le toro fait preuve d’alegria, de noblesse et nous
fait regretter l’extinction de cette encaste. A droite, Bolivar sait
profiter des qualités de l’animal .Il se croise (et oui, il sait
le faire) pour de bonnes séries de derechazos justement applaudies.
A gauche, le toro est un tout petit peu plus complexe. Bolivar l’aborde
avec méfiance et revient très vite à droite. Et c’est là que l’on
voit les limites entre un torero expérimenté qui sait exploiter les
qualités d’un toro et un grand torero qui sait se sublimer et sublimer
ses qualités.
Une estocade en deux temps et longue d’effet limite le succès à un
salut au tiers ; L’arrastre est ovationnée par le public debout (une
fois de plus les présidences n’osent plus accorder de vuelta si le
torero n’a pas triomphé).
Nous avons assisté à un bon moment de tauromachie grâce au toro, mais
il permettait plus que ce Bolivar a réussi à en tirer.
Le cinquième est le manso de l’après-midi. Il sera piqué avec beaucoup
de métier par Ismaël Alcon. Le toro a une charge courte, il faut le
consentir pour le faire passer. Bolivar replonge dans son habituelle
apathie et se contente de quelques passes isolées, fuera de cacho
et termine en boudant, car apostrophé par une partie du public, sa
faena et la conclue par une très mauvaise épée.
Thomas
Dufau complétait ce cartel .Il est aujourd’hui en mal de contrat
mais sa participation est aussi un juste de retour des choses vis-à-vis
d’aficionados qui l’ont aidé à se faire connaître et l’ont engagé
à maintes reprises alors qu’il était novillero.
Il a très peu d’expérience en dehors des toros d’encaste Domecq et
cela va se sentir tout au long de l’après-midi. Son premier adversaire
est playero, sans pointe et le plus léger de l’après-midi.
Très distrait, il charge en tricotant avec ses cornes. Il prend une
bonne pique puis un picotazo pour la forme. Il a un fond de noblesse,
ou un défaut de vue et charge mieux de loin que de près. Dufau en
tiendra compte en début de faena pour des séries manquant hélas d’engagement
utilisant trop souvent le pico de la muleta. A gauche le toro est
cité de trop près et sans cette autorité (mando) que nécessite un
manso con casta.
Une épée très moyenne mais efficace et une oreille (très régionaliste)
tombe du palco. Le 6ème est un des mieux présenté de l’envoi. C’est
un vrai manso avec beaucoup de caste. Quelconque à la pique, il permet
à Rafael Viotti de briller avec les palos.
C’est une tauromachie de combat que nécessite un tel animal, Dufau
l’a compris et va utiliser, pour une fois, sa main gauche pour arracher
avec beaucoup de sincérité des séries de deux ou trois naturelles.
Ce n’est pas le jour de faire dans la fioriture et Dufau, par manque
de technique, va l’oublier. Il commet l’erreur de croire le toro dominé
et commence à lui servir des molinetes et autres passes « décoratives »,
faisant toucher sa muleta. Le toro, qui avait fini par l’oublier,
se rappelle qu’en derottant il peut toucher et inflige au torero une
cogida impressionnante et qui aurait eu des conséquences dramatiques
avec des cornes « normales ». Dufau s’en tire miraculeusement avec
seulement trois côtes fêlées.
Il tue le dernier des Sanchez Fabres d’une épée rinconesque mais d’effet
spectaculaire. La présidence jusque là raisonnable cède au régionalisme
en accordant deux oreilles (une de trop), mais se reprend en résistant
à la demande de vuelta au toro sous prétexte que le torero a triomphé.
Sortie
en triomphe par la grande porte discutable de Dufau et salut mérité
du mayoral.
Le prix du meilleur piquero revient à Luis Miguel Leiro qui a piqué
le second toro.
En résumé,
un après-midi qui prouve que l’on peut organiser des corridas intéressantes
voire réussies hors les sentiers battus et qu’il y a du potentiel
dans les ganaderias d’encastes autres que Domecq. Sanchez Fabres s’arrête
de faire lidier mais pas d’élever ses Coquillas, il y a d’autres élevages
qui peuvent fournir aussi des « toros différents » et pas forcément
très loin de chez nous (je pense aux Pedrajas de l’Astarac, aux Atanasio
Fernandez de Malabat, à la branche Cebada Gago de Bonnet) et des toreros
(comme Calvo) qui méritent qu’on leur donne une chance.
Trois
petits points pour terminer :
Je
pratique régulièrement le dos tourné lors de vuelta (torero ou toro)
non justifiée et continuerai à le faire et de façon forcément visible
car je suis assis en barrera (je paye mes places). Par contre il
me semble déplacé de le faire quand le torero a été châtié par un
toro sérieux lors d’une faena honnête ; C’est pourquoi j’ai tourné
le dos à la première vuelta de Dufau et me suis contenté de ne pas
applaudir la seconde et la sortie en triomphe (ceci est un message
pour mes amis et non amis du dernier rang en face).
Alain
Bonijol doit arrêter de se prendre pour le messie en voulant tout
régenter lors des premiers tiers ; Le patron c’est et restera le
matador, comme l’a rappelé Ismaël Alcon à l’ex-torero gardois.
Il
y a lieu de râler contre les cornes des toros de ce jour, mais plus
contre les cuadrillas et apoderados qui imposent au sorteo leur
loi dans toutes les arènes que contre des aficionados romantiques
qui ont pris le lot pour ce qu’il était, les derniers Coquillas
de Sanchez Fabres
Encore
une fois merci au collectif Pedrollen pour son aficion et son opiniâtreté!
Prochains rendez vous à Vic, pour je l’espère une feria COMO ANTES