Corrida
des fêtes d’Aire sur Adour,
dimanche 16 juin 2013
6 toros de Prieto de la Cal (le 5ème remplacé par un sobrero
du même fer) pour Marc Serrano (vuelta pagnolesque, silence) Javier Castaño (salut au tiers, silence) Manuel Escribano (silence, silence)
A peine une moitié d’arène sous un soleil provisoirement revenu
Photos
Laurent Larroque, tous droits réservés.
Tous
les jeux de mots ayant été faits dans la presse et sur la blogosphère,
il ne reste plus que les références au naufrage du Titanic ou aux
profondeurs du gouffre de Padirac pour décrire la désastreuse corrida
à laquelle nous avons assisté ce dimanche sur les gradins aturins.
La faute en incombe à un lot de Prieto de la Cal juste de gabarit,
aux armures commodes voire très douteuses pour certaines et surtout
totalement dénué de force et surtout de caste. Qu’ils sont loin les
jaboneros qui ont fait se lever les aficionados.
Le premier
a une corne droite escobillée, il est boiteux . Face au cheval il
mettra autant d’entrain qu’un gourmet gersois attablé devant un hamburger
estampillé Mac Do. Le Prieto arrive dans la muleta de Marc Serrano
en marchant ; La faena essentiellement droitière est une succession
de passes au petit pas sans la moindre émotion. Cela manque de sel,
de poivre et de cuisson, l’entourage du torero essaie de relever le
plat en le pimentant d’une vuelta après une estocade lamentable mais
rapide. La vuelta est chahutée avec une séance de tourne dos de la
part de quelques gastronomes mécontents.
Le quatrième sera passé au shaker, au second tercio, par une cuadrilla
dépassée comme de jeunes marmitons lors de l’épreuve du bac ‘hôtellerie
/ restauration » et arrivera décomposé à la muleta .Toro et torero
chipoteront dans leur assiette comme Obélix devant un sanglier bouilli
et le public ne sortira pas de sa somnolence quand repartiront en
cuisine, pardon en coulisse, les restes d’un plat indigeste.
Javier
Castaño est arrivé sur les bords de l’Adour avec son quintette
à pied et à cheval. On attendait un concerto baroque à la Jordi Saval ;
on a eu quelques solos de percussion au compliqué second et un arrangement
musical à la André Rieu au quatrième. Le second Prieto de la Cal a
dû laisser une partie de ses cornes au campo ; Il la joue façon
sourdine face au piquero ; Fernando Sanchez récite ses gammes avec
beaucoup de talent avec les palos . Castaño entame son concert
par une toccata en passes de rodilla hélas mineures. Le Prieto est
un instrument compliqué, il accroche dans les basses et les aigus.
Castaño s’arrime et joue une partition robleñesque à
coup de passes arrachées une par une qui constitueront les seuls moments
intéressants de l’après-midi. La note finale n’est pas à la hauteur
et le soliste doit se contenter de saluer au tiers ;
Le titulaire du cinquième pupitre s’effondre après deux foulées sur
le sable (colonne vertébrale lésée lors de la pose de la devise),
il sera achevé après plusieurs tentatives du puntillero par le vétérinaire
avec un pistolet électrique .
La doublure sera le plus costaud de l’après-midi. Il a quelques qualités,
mais il sera toréé façon André Rieu ; Premier couplet à la pique chanté
par un grand artiste ,Tito Sandoval, qui rate le premier contre ut
(pique trasera) ,joue le trémolo façon ténor de banquet lors de la
deuxième rencontre (non poussée par le cornu) .Il finit en play back
avec une rencontre al regaton aussi artificielle et déplacée que les
vocalises de Mireille Mathieu et Jeane Manson le soir de l’élection
de l’ancien président . Sandoval est un grand picador, ce jour je
suis partagé entre l’ovationner pour ses mises en suerte et ses cites,
et grogner pour les fausses notes lorsque le toro est sous le fer.
Au refrain interviennent les Banderilles Brothers (Adali, Sanchez),
sans forcer leur talent ils sont applaudis par le public. Comme souvent
c’est le troisième du trio ( Galan à la brega) qui par la justesse
et le tempo de ses interventions aurait du recevoir une ovation majuscule.
Mais à part dans le Boléro de Ravel qui se soucie du percussionniste.
Tel Roberto Alagna, Castaño a pris l’habitude de ne pas forcer
son talent. Le toro permettait de briller, mais pourquoi se fatiguer
sur une scène dont le retentissement médiatique est limité .La faena
est prudente et est conclue avec encore plus de prudence. (Silence
après 3 pinchazos et un descabello à toro vif).
Manuel
Escribano habitué ces dernières années au succès dans les prix littéraires
de sous-préfecture, vient de remporter ces derniers temps quelques
Goncourt et Renaudot qui ont relancé sa carrière. Hélas il n’est vraiment
à l’aise que dans le lyrisme des grandes épopées. Ce jour, il a tiré
au sort deux exercices de style dans lesquels il ne brille pas : Le
récit médical façon Docteur House face à un premier adversaire invalide
et souffreteux, et le monologue façon Fabrice Lucchini tant son second
adversaire était sans intérêt. Quelques éclairs (banderille ou épée)
nous ont rappelé que Manuel à un certain talent, mais sans nous sortir
de notre léthargie.
Sandoval a été désigné meilleur picador, mais au royaume des aveugles,
les borgnes sont rois. Rien à dire aujourd’hui de nos amis samadetois
de la Pena Al Violin, la corrida a été tellement nulle qu’ils sont
restés silencieux quasiment toute l’après-midi. Aire continue à s’enfoncer ;
Les organisateurs accumulent malchance et manque de lucidité dans
leur choix (toros et toreros). Au lieu de faire preuve d’imagination,
les aturins se raccrochent à des vieilles recettes pour lesquels la
qualité des ingrédients est trop aléatoire. Il va falloir qu’ils trouvent
leur « coach » avant que tout ne vire au cauchemar en cuisine.
Thierry
Photo
Laurent Larroque, tous droits réservés.
On ne chope pas les photos!